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Am, stram, gram ,
Que les ondes m’emportent ! J’en reste assise sur mon fondement : on devrait se méfier des mots trop coulants. Je ne pensais pas qu’un amour si suave puisse être aussi fourchu qu’un micocoulier.
Pic et pic et colegram,
Ça me pique de partout mille aiguilles aiguisent mon intuition avec une logistique imparable : un coup je te plante là, un autre je te darde ailleurs…la barbe. Ça repousse toujours, quoiqu’on fasse.
Bour et bour et ratatam,
Tu t’agites en moi et mon esprit a oublié de se déconnecter de ses neurones. J’ai l’entendement trop assidu. La raison accrochée à mon cerveau primaire, j’ai beau essayer de me fondre entre tes cuisses et tâcher de boire la tasse orgasmique comme il se doit, tel un sémaphore déchaîné, rien à faire, ma cervelle est en ébullition.
Pic dam,
Corps en plein déménagement (c’est l’printemps, on s’met au régime), cœur en plein ravalement (on en prévoit un bétonné jusqu’aux ventricules), âme en pleine décoloration (on prévoit à l’avenir des nuances beaucoup plus endurantes) : j’ai l’air d’une pécheresse en plein repentir.
C’est malin, fallait y penser avant toi.
mars 2014
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« C’est du sel ».
Vous le savez bien, de vous à moi, je vous avais donné rendez-vous pour mes 100 ans.
J’ai juste pris les devants.
J’avais oublié tous les mots qui furent ma vie, le présent aplati s’était vidé de tout sens, aujourd’hui ressemblait à hier et demain était pareil. Heureusement que je ne m’en souvenais pas mais vous, vous le saviez, et à nous tous on faisait une douloureuse moyenne.
Vous vous demandiez ce qu’était devenu cet homme bedonnant et malicieux qui vous intimidait un peu.
Oui, je voulais me faire cet honneur-là, l’accrocher à mon veston près de mes autres décorations, et l’arborer fièrement à tous les vents de Beauce et de partout : je voulais fêter mes 100 ans.
Alors, faites comme si mes 100 ans c’était la nuit des temps, faites comme si pour toujours chaque matin je passais un peigne dans l’eau de Cologne de mes cheveux, comme si chaque jour mes gros doigts sur vos épaules ou dans vos pognes vous secouaient trop fort pour vous saluer, comme si pour toujours à chaque Noël je m’enrhumais par les pieds, comme si à jamais je ne disais pas « s’il te plaît », mais réclamais « Ah, c’est du sel ! ».
Car oui, c’est du sel, saupoudré sur vos vies au cours de nos rendez-vous, c’est du sel que j’ai semé en vous comme autant de grains sauvages qui germeront tout au long de votre route.
Je vous ai montré le chemin de vos racines sous mes pieds, cette terre amoureusement foulée, et celles plus profondes encore ancrées dans les chants que je vous offrais.
Car de moi vous vous moquiez gentiment, mais toujours quand je chantais vous vous taisiez, parce que ma voix avait la résonance profonde de tous les hommes que j’ai été : un paysan, un chef de famille, un mari et un père ému, un grand père et un arrière-grand-père amusé.
Oui, je suis peut-être parti rejoindre mon fameux spoutnik ou tout ce qu’il vous plaira d’autre…
Je vous oblige à tourner une page, mais sans doute continuerez-vous à écrire main dans la main ce livre de toutes nos époques, ce livre que nous avons ouvert pour ne plus jamais le refermer.
Alors, ma femme, mes enfants, ma famille, mes amis : il est temps.
Pour la dernière fois, j’abats mes cartes, je cogne, et l’emporte au paradis, ce sel de la vie que nous continuerons à partager.
septembre 2014
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des trains des routes des autoroutes
des ponts des quais des voies
des métros des chemins des randos
pour lutter contre toi
pour te faire passer.
avril 2009
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« Hasta luego ! » crachaient les haut-parleurs sur la braderie estivale.
Tongs aux pieds, casquettes, peaux tannées, cris d’enfants et odeurs de marché: plein mois d’août, le matin était déjà lourd de soleil.
Les gens flemmardaient sur les terrasses, ça sentait le café et j’avais envie d’une cigarette.
Je la regardais du coin de l’œil. Depuis peu, je ne pouvais faire que ça, la mater en douce, ma fille. Mes yeux devaient être équipés de rayons insultants, elle ne supportait plus mon regard.
Casque sur les oreilles, elle marchait chaloupée, hautaine et indifférente.
Je l’avais traînée là au milieu de la foule, depuis le mobil-home que j’occupais pour rien en échange du ménage des sanitaires. Le patron du camping était un vieil ami, habitué à mes errances de louve esseulée.
Il m’avait découvert un matin, assise au bout du chemin qui mène à la plage à travers les dunes, le jean déchiré, les yeux dans le vide et les cheveux emmêlés. J’avais posé le casque à mes pieds.
C’était la saison morte, le camping était fermé mais il venait s’assurer que les canalisations ne gelaient pas, « pour la forme », il disait, car en fait ça ne voulait jamais faire froid ici.
Pendant qu’il me racontait ça, il a pris mon bras avec précaution, évitant les contusions qui bleuissaient la peau, et m’a amené devant la porte du mobil-home. Après avoir déposé un radiateur électrique à mes pieds, il m’a dit « Salut, à demain » et il est parti. Il est revenu le lendemain et moi je suis restée, il est resté dans mon lit quelques nuits et je suis repartie.
Depuis je reviens l’été, l’hiver je ne pourrais pas. J’ai besoin que rien ne se ressemble, et j’aime les touristes pour cela. Je reviens, pour lui et pour elle.
Ses lunettes lui mangeaient le visage. Les cheveux relevés en un chignon savamment défait, avec son minishort élimé et son t-shirt en cotonnade de dentelle, elle avait l’air délicieusement maussade.
Elle s’était arrêtée devant l’étal des perles et plongeait ses mains dans les boîtes, comme quand elle était enfant, on écossait des petits pois avec sa grand-mère…ça roulait sous les mains elle riait de plaisir.
Elle entretenait avec le camelot une conversation animée, tendant la main à droite, à gauche, cherchant une perle là, un fil ailleurs.
J’étais plantée dans l’allée, écrasée de chaleur. La foule me contournait comme les algues vertes s’étalent autour d’un rocher dans la mer.
C’est là que ça se produisit. Ce clapotis sur le goudron. Elle s’empressa de courir après les perles en riant. La fuite des perles dans la fougue du rire de ma fille, le roulement des boulons sur la route après ce rire, son rire… Et moi qui ce soir-là me cramponnait au cuir de son blouson.
Sous mes pieds les abysses. Minée, rongée à toute vitesse le cœur fou vers le fond.
La moto. Elle avait fait une embardée. Le cuir m’avait échappé. J’étais quelque part au milieu du rien et j’entendais tout son rire et le roulement des boulons, ça résonnait dans ma tête protégée par le casque. Son casque, il me l’avait prêté.
Puis il y avait eu les lumières bleues, les hommes autour de moi, et après, longtemps après j’avais cherché la mer je voulais m’y noyer. Auguste m’avait alors trouvée.
Elle n’était pas à Auguste mais bien à lui, elle appartenait à ce rire.
Tondue démasquée dénudée.
Une tonte à ras la chair et de ce qu’il me restait de carapace. Je n’avais jamais voulu me l’avouer.
C’est plus facile d’élever l’enfant d’un vivant. Ça ne vous rappelle pas votre deuil permanent. Ça ne vous exhume pas les souvenirs en vous hachant menu ce qu’il vous reste de cœur.
Elle venait de ce rire dans le vent sur la moto.
« Hasta luego ! », criait l’autre dans les haut-parleurs sur la braderie d’été.
C’est ça, hasta luego mon amour, et à jamais.
juin 2014
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"Je veux me sentir libre" me disait Roméo
Et Juliette sur les murs exhibait son ego.
Ce n’est rien dans ton cœur ce n’est pas une aiguille,
Mais choisir le dimanche les vêtements des filles...
"J'avoue te dire je t'aime, à part moi, en dedans"
Et les mots entre nous sont inquiets de leur sens
Ce n’est rien qu’une pichenette dans ton cœur-bille
Mais préparer dimanche le repas des filles...
"Je veux partir en Inde mais seulement quelques mois"
Et l'odeur de curry se mêle à tous tes plats
Ce n’est rien dans ton cœur une boule dans un jeu de quilles
Mais nouer le dimanche les longs cheveux des filles...
"Je ne suis pas en couple" mais je suis avec toi
"Je suis célibataire" Et quand tu pars là-bas ?
Ce n’est rien dans ton cœur ce n’est pas une torpille,
Mais dans mes bras dimanche les au-revoir des filles ...
février 2014
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