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Je salue l'homme en toi le masculin le viril
L'odeur du matin dans la grotte de tes bras
L'odeur de ton sexe dans le creux de nos draps
Je salue l'incertain l'instable le pas sûr
Le passé insondable
L'empire insoumis de ton monde
Le futur improbable
J'étreins le présent qui glisse entre nous
Graines de peut-être sur mes jours convenus
Grains de bonheur sur l'amour revenu.
Mai 2014.
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I
Le couteau s’enfonce dans l’épaisseur du pain. Une large tranche entaillée dans la miche. Les mouches s’en reviennent glaner le suc de la mie exsangue.
La bouche mord, en habituée, et le beurre se répand sur la pulpe des lèvres. Je regarde ça, les lèvres qui mangent le pain, le beurre, le mouvement des lèvres fermées, le beurre qui luit sur la bouche.
Le couteau reviendra quand le pain sera mangé, et le ballet des mouches, le beurre répandu sur la tranche, les lèvres qui mâchent, encore.
Le regard toujours perdu, les yeux ailleurs que dans la bouche, les yeux dissociés du manger et du boire.
II
S’il ne devait en rester qu’un ce serait celui-là.
Il serait là, sur la maison basse, le sol campé sous ses pieds, car ce serait le sol qui le tiendrait là, bien droit, bien debout, parce que la tête cent fois par jour elle voudrait s’envoler.
Et s’il n’en restait qu’un ce serait celui-là, vous dis-je.
Je porterais une robe blanche en dentelle et aurais l’air d’avoir dansé toute la nuit, légère et décoiffée, folâtre et nu-pieds.
C’est là que ça se produirait.
Le regard de cuir tanné d’abord, fort et sûr, qui attraperait le mien, ensuite la bouche, un ange triste l’aurait dessinée à rebours, et je glisserais sur les commissures plongeantes.
Ce serait déjà trop tard.
Parce que ses deux bras auraient l’air de prendre un envol solennel, et à mi-chemin entre la terre et le ciel, je n’aurais plus qu’à me laisser consumer de chaleur dans la houppelande de ses bras resserrés.
III
Vous imagineriez aisément les mots qui dévalent de la bouche, les pierres qu’on roule pour ouvrir des cavernes, les éboulements de voix sonore…la vérité à vos pieds comme collée à vos bottes.
Mais si vous tendiez l’oreille…la voix s’ajuste au regard du souffle presque éteint, zéphyr tiède offrant paroles au silence.
IV
Alors vous voudriez connaître, parce que ce n’est pas assez, le goût des tanins de la peau, et, le nez dans les broussailles, l’odeur de l'homme endormi du sommeil des Titans.
août 2013
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Elle ne m’avait pas décroché un regard.
Elle ne m’avait pas décroché un regard et elle avait les cheveux sales, comme quand on s’en fout, de tout, quand il n’y a plus rien qui compte que les idées fixes et les sentiments lourds qui collent aux dents serrées dans la bouche.
Elle avait les cheveux sales et les doigts volubiles, scorpions sur l’écran tactile. Les mots convulsés se hâtaient, virés d’un coup de pouce vers un spectre que j’aurais bien démonté d’un coup de boule.
Finalement, qu’est-ce que ça pouvait me faire au juste ?
Je fixais un point au hasard.
Je fixais un point au hasard et je faisais semblant. Ce livre, je ne le lisais pas, cette vie je ne l’existais pas. Et ce flot d’envies que je ne laissais jamais jaillir. Comme un volcan enfoui sous les eaux je me consumais de l’intérieur.
Je faisais semblant et je ne sais même plus où j’allais. De toute façon je n’allais jamais vraiment nulle part. Le froid dans les oreilles malgré la capuche rabattue, j’étais assis là sur ce banc, derrière tous les autres et tous les autres à côté.
Finalement, qu’est-ce que ça pouvait leur faire au juste ?
Ils attendaient.
Ils attendaient et ils pensaient à leur journée. A ces heures à tirer avant le canapé, la soupe, la télé.
Ils pensaient à leur journée et bruissaient comme des jouets. Sous la lumière artificielle des pantins désarticulés de leur vie, des enfants désenchantés prisonniers d’un chœur accablé.
Finalement le métro nous avait fauché eux, elle et moi, le souffle dans mes oreilles je me souviens, ça faisait plus de bruit que les tempêtes de mon océan natal.
Et j’étais ravagé.
avril 2014
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Tomber les yeux clos sur l’épaisseur de la couette, de tout mon poids.
L’anneau d’or trébuche sur la table de nuit, virevolte tel une toupie. J’ai le vertige…
Ouvrir les yeux sur la lucarne.
Le chat…Il piétine, le long de mon flanc, le moelleux d’un coussin, tapissant d’imaginaires herbages.
Selon un rituel qu’il porte en son instinct fauve, il finit par se rouler en boule, avant de fermer ses yeux lunaires… Alors je l’entends, ce moteur zen qui monte de son corps, bourdonnement hypnotique qui dévie mes angoisses si souvent.
Eteinte, la lumière ; rester dans la pâleur douce d’un rayon de lune. Ne pas faire fuir le chat.
Clore les portes et les fenêtres, fermer le couvercle sur le songe. Enveloppée de pénombre, garder intactes les sensations, les images, juste regarder à l’intérieur le film de la soirée, la chaleur du chat comme un baluchon rassurant.
…"Elles sont parfaites. Maquillées, habillées pour être vues. Font savamment mine d’ignorer les regards posés sur leur hardiesse. Autour, des êtres achevés exhibent leur virilité. Les muscles bandés, la peau lustrée. Sûrs d’eux.
Je cherche derrière le lisse, le parfait, l’absolu masculin. Je scrute les crânes presque nus, les nuques nerveuses et les épaules larges.
Mon regard glisse, rien ne l’accroche. Pourquoi ? Cette question lancinante…et l’anneau sur la table qui me brille en coin…
Et puis soudain je sais… je sais ce que je ne peux trouver…Où se cache la fêlure, celle qu’on surprend dans un regard perdu, qui se livre d’un sourire trop lointain, adressé dans une rêverie de passage à un passé intime…. Il n’y a qu’elle qui me convainc. La fêlure, toujours : la chaleur animale qui persuade mon âme qu’être humain est encore possible.
Et je me dis…Au-dessus de nos failles nous construirons des ponts, nous serons en lien. Nous conjuguerons nos douleurs félines, dociles et insoumises. Tu lècheras mes plaies et je panserai les tiennes, nous serons à l’abri de l’imposture."
J’ouvre les yeux : la lucarne, elle baille à toute envergure. Ai-je rêvé longtemps ?... Le chat…
Ma peau fourmille encore de sa chaleur. Mais plus de mécanique bien huilée à mes côtés. Dehors, un moteur exaspéré crisse et s’enfuit.
Je m’agrippe aux quelques sensations qui affleurent encore…Les chimères se sont fait la malle par la lucarne entrouverte. Le chat leur a ouvert la voie.
L’histoire que je rêve n’habitera jamais que des châteaux en Espagne : le désir toujours finit par se coltiner la réalité.
Je le sais parce que le chat me l’a ronronné à l’oreille.
Juste avant qu’il ne disparaisse avec mon anneau doré.
août 2012
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Elle a saisi les deux poignées et l'a refermé
fermement
Elle s'est envolée vers d'autres projets mais il l'a rattrapé
prestement
Le vide derrière les portes closes le noir
les habitudes
Un coup dans l'aile, un coup au cœur, un poignard
la certitude
Trop tard trop de renoncements trop de rien
pas de nostalgie
Défroisser déployer les ailes, enfin,
agir...
Ne t'en remets plus au hasard :
il est grand temps de sceller les portes du placard.
août 2009
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