• Etre (un jumeau) perdu...


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  • OdysséeRelation tendue comme un fil entre deux falaises,

    En équilibre entre le tout et le rien.

    Depuis la première question qui précéda le premier baiser

    Notre parcours initiatique bordé de sirènes

    Nous ballotte d'écueils glacés en brûlants déserts.

     

    Perfides vipères, quand vos langues fourchues chuintent le désespoir

    Voyez la morsure du désir dans le noir,

    Sorcières, quand vos mots meurtrissent et griffent les espoirs,

    Je me bande les yeux je ne veux pas voir.

     

    Moi je ne vois que tes yeux qui sont ma madeleine

    Mon péché mignon, ma petite crème.

    Souviens-toi...

    Naufragés solidaires,  

    Dans les yeux l'un de l'autre noyés volontaires, 

    Nous nous admirions pendant des heures

    Tu me demandais souvent quand finirait ce bonheur

     

    Aujourd'hui nos regards scrutent, épient, guettent

    Nous pénètrent, interrogateurs, et nous inquiètent

    Je voudrais encore me noyer dans tes yeux, contempler l'océan, ta liberté, notre folie, 

    Troquer ces "quoi ? qu'est-ce qu'il y a ?" contre un peu de magie.

     

    Entends-tu leur chant ? Détournons les yeux, ou nous serons perdus.

    Revenons nous exalter au plus creux de nos iris...

     

    Je t'aime, du fond de nos abysses

    Je t'aime mon amour,

    Mon Ulysse.

     

     

    décembre 2010


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  •  

    Je pense souvent à l'océan

    Noyer mon regard au-dedans

    Il y aurait du vent pour souffler la détresse

    L'odeur intime du sel entre les rochers, d'algues mortes sur le sable sec

    Il y aurait du vent pour souffler la détresse

    Et l'immense et le grand pour unique caresse

    Se sentir consolée d'être tellement rien

    Se sentir avalée et oublier le reste.

     

    janvier 2017


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  •  

     

     

     

    Derrière la fenêtre... ça la prenait là, devant ces lumières vives dans la nuit.

    Elle n'avait même pas vue sur les montagnes.

    Il fallait qu'elle se satisfasse de cela, renoncer aux idéaux d'une jeunesse ignorante.

    Ici le paysage ne lui était pas cher. Il était beau mais elle n'était pas émue. Elle ne ressentait rien. 

    Qu'y pouvait-elle si devant les plaines infinies où filent les martinets elle tremblait d'enfance ? On ne peut rien contre ses racines.

    Elle était venue ici pour voler elle aussi, mais toujours ses ailes mazoutées la ramenaient au-dessus des ondulations des blés mûrs.

    Il lui avait fallu inventer sa vie, le jour où elle avait décidé d'être seule.

    Et accepter de loger au fond d'elle-même des envies de normes mal assumées.

     

    avril 2016


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  • Lutherie« Bienvenue », il me dit quand je passe la porte.

    Sa porte qui gémit en se refermant sur moi. Un gémissement plaintif de chouette impavide.

    « Bienvenue », il me redit quand je dépose mon fardeau à ses pieds.

    « Bonjour », je marmonne, un brin gênée.

     

    « Pardon », il me dit, au son de la fermeture éclair de la boîte.

    « Je cherche à me souvenir qui vous êtes et pourquoi vous venez. »

    « Ah, oh pour rien. Enfin si, je dis, je viens…

    Parce qu’il ne marche pas. »

    « Oui, je me souviens, la dame à la table fendue, la dernière fois… Et aujourd’hui ? »

    « Les cordes… »

    « Bien bien, je vois ...cette fois, vos chevilles, elles ne tiennent plus… »

    « Ah ! »

    « Donnez. »

    Je donne.

    Il prend.

    Le tabouret geint sous mon poids.

    Une lamentation de grand-duc philosophe. Qui aurait une certaine tendance à l’ironie.

    Me voici perchée.

     

    Il frotte, craie, graisse, lime. Il pousse, tire, tourne, enroule.

    Les octodons à roulettes trompent l’ennui dans leur cage. Une course infernale contre rien, et les dents furieuses qui rongent et rognent.

     

    L’ouïe étourdie par les va et vient, je me souviens aussi.

    Vacarme des heures passées corps accords contre lui, avec lui, à rechercher dans les caresses des notes les vérités enfouies, des intentions mises à nues, la justesse des tons et la beauté des gestes, l’intensité d’une mesure, la sérénité d’une autre, tant d’heures alternées à tant de pauses, tant d’envie additionnée de tacet interminables.

    Mes harmoniques tombées par terre, et la table brisée.

    Mes doigts agités sans autre refuge que mes poches vides.

    Mon compagnon de vie déshabillé dénudé désossé pour un sondage impudique de ses entrailles abimées.

     

    Dans la cage des octodons, la roue tourne. L’heure de la surpatte cocasse est trépassée, les griffes sous le museau les voilà figés dans une méditation rongeuse.

     

    Je songe que j’ai déjà tout joué, tout ce que je pouvais, lui et moi sommes fatigués, je lui rends les arpèges esquintés, le vibrato abîmé, toutes ses portées ses clés, il me rend la mesure du temps qui passe et que je voudrais déchiffrer.

     

    Il se lève soudain et d’un geste autoritaire, réajuste une mentonnière.

    « Le cordier, il était cassé. Pour l’accorder, il faudra revenir. »

    « D’accord » je dis, sans penser à me taire.

    Car je sais déjà que lui et moi, ce n’est plus qu’un souvenir.

     

     

    Et ne pas le regarder pour taire les soupirs.

     

    février 2017

     

     


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